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Macaroni !

Macaroni !
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macaroni-couvUne histoire d’immigration, de gens déplacés, chassés par la misère, par la faim, par la maladie, vers des pays plus riches, à la population souvent réticente à voir arriver ces vagues d’émigrés misérables, tellement différents d’eux-mêmes, parlant une langue « exotique » et dont le mode de vie leur semble si… différent.

Ces travailleurs émigrés, on les appellera avec un peu de taquinerie et sans doute de condescendance les « Macaronis » en raison de leurs habitudes alimentaires. Ils s’établiront aussi loin que les Etats-Unis, le Brésil, l’Argentine, et aussi près de nous que le nord de la France et la Belgique.

Immigration pour cause de récession économique dans un premier temps : l’Italie majoritairement rurale de la fin du 19e siècle connaît de profondes transformations avec l’unification du pays en 1861. La réorganisation territoriale laisse de nombreux paysans du sud de la péninsule sans terre ou avec une terre maigre, trop peu fertile, dans des régions infestées par la malaria.

L’immigration se poursuit à l’approche de la Première Guerre mondiale avec la multiplication des besoins de main d’œuvre : il s’agit alors de faire tourner les usines à plein rendement en prévision du conflit.

Puis vient la période du Fascisme, qui apporte elle aussi une nouvelle vague d’immigration, politique cette fois.

Ainsi se développe et s’étend la diaspora italienne de part le monde. Dans son beau livre «  Le Christ s’est arrêté à Eboli », Carlo Levi témoigne du fait que certains villages de ce que l’on appelait alors la Lucanie, l’actuel Basilicate, avaient vu partir pour l’étranger la moitié de leur population, parfois plus. Population d’émigrants majoritairement masculine, les villages ne restant plus occupés que par les femmes et les enfants et par une poignée d’hommes pour cultiver les maigres terres.

Au début du 20e siècle, la communauté italienne en France atteint 500 000 personnes. Avant la Seconde Guerre mondiale, elle en comptera plus de 800 000.

Communauté tranquille et pacifique, elle ne manque cependant pas de soulever une hostilité, parfois violente, parfois tout simplement condescendante… Ces « Ritals » sont l’objet de mépris et de quolibets. Lui-même fils d’un immigré italien, l’écrivain François Cavanna le racontera avec tendresse et émotion.

Principalement regroupés en banlieue est de Paris et plus au nord, de part et d’autre de la frontière entre la France et la Belgique, ils travaillent en usine ou dans les mines de charbon.

macaroni

Il en est ainsi du personnage principal de « Macaroni », vieil italien immigré très jeune et sans vraiment l’avoir voulu dans une banlieue de la cité belge de Charleroi, pour y travailler dans la poussière des mines de charbon, si loin de son Italie natale.

C’est Ottavio, désormais retraité, grand-père aux « airs de vieux bougon », cloîtré avec ses souvenirs dans une petite maison de brique rouge d’une rue sans âme et sans soleil, cultivant ses légumes dans son carré de jardin, avec pour toute compagnie, un cochon nommé « Mussolini ».

Ottavio a un fils, qui a lui-même un fils, Roméo, peu enclin à aller rendre visite à ce grand-père taciturne qu’il surnomme « le vieux-chiant ».

Une occasion fortuite contraindra grand-père et petit-fils à passer une semaine ensemble. Une semaine de découverte de l’autre pour chacun des deux personnages.

Une belle histoire, tendre et nostalgique, sur fond de corons, dans un pays minier attaché à son passé.

Signée par Thomas Campi et Vincent Zabus, cette histoire est préfacée par le chanteur Salvatore Adamo, lui-même membre de cette communauté des « Macaronis ». Né en 1943 dans le sud de la Sicile il a suivi ses parents dans la ville belge de Mons où son père avait trouvé un emploi à la mine :

A notre arrivée en Belgique, mes parents et moi avons vécu trois ans « à l’écart » au purgatoire si j’ose dire, dans une cité de baraques en bois, au toit en tôles ondulées, à un jet de pierre de la mine où trimaient mon père et ses amis émigrés.
Ils ont broyé du noir, au sens propre et sale. Le charbon était partout, il noircissait le ciel, le vert des arbres, les prairies, les nuages, les mineurs, leur femme, leurs enfants, leurs repas, et sans doute leur esprit.

Macaroni – Scénario : Zabus – Dessin : Campi.
Date de sortie : 1er Avril 2016
144 pages couleurs. Format 237 x 301
Prix 24 €  
Editions Dupuis.